HistoireS de France, le grand voyage
“Juste, drôle, entrainant, et très réussi.”
Patrick Boucheron
“ Une énergie impressionnante. Mise en scène astucieuse. Et interprétation remarquable.”
“Du rythme, de l'humour, de l'intelligence, vous passerez un très beau moment, en famille”
Dates passées
du 29 juin au 21 juillet 2024:
Festival Off Avignon, Théâtre de la Porte Saint-Michel
25 juillet 2024:
Le Cabas, Luc-en-Diois (Drôme)
Durée: 1h05
Genre: comédie historique
Tous publics
Jean-Candide est guide touristique à Chauvet 30 000, reconstitution quelque peu fantaisiste de la grotte Chauvet. Lors d’une visite, Jules Michelet, le grand historien du XIXe siècle, inventeur du « roman national », l’invite à découvrir d’autres récits de l’histoire de la France. Le voyage commence.
De la Voie Triomphale et sa galerie de grands personnages allant de Vercingétorix à De Gaulle jusqu’au Tunnel des Oublié.es et ses multiples voix souterraines, les rencontres s’enchaînent. Jean-Candide croisera tour à tour un professeur d’histoire-géo obnubilé par l’école de la IIIe République ; le gardien du Grand Dépotoir, lieu étrange où finissent certaines figures de notre histoire ; et même son propre ancêtre, un paysan du XVIIe siècle.
Cédera-t-il alors au Roi-Roman, qui lui propose de présenter une émission de télévision, Sécrétions d’Histoire, sur les soucis de santé de Louis XIV ? Un voyage initiatique qui changera à jamais son regard sur les différentes manières de raconter l’histoire de la France.
Intention
De quelle histoire de France avons-nous aujourd’hui besoin ? C’est la question à l’origine de ce spectacle.
Doit-on revenir (mais en est-on vraiment sorti?) à une histoire romancée, jalonnée de rebondissements se répondant les uns aux autres, une histoire-feuilleton avec ses grands moments de réjouissance comme ses grands passages tragiques ? Ce « roman national » continue de forger notre imaginaire collectif, fait le succès d’émissions télé comme de best-sellers et est au cœur de certains discours politiques. Il convoque nos émotions, parfois enfantines, et fait la part belle aux grands personnages quasi-Shakespeariens : le destin d’une nation y est lié à des querelles interpersonnelles. Une histoire hautement théâtrale.
- Ce spectacle interroge une position particulière. L’histoire de la France s’est longtemps écrite au masculin, que ce soit au niveau des auteurs qu’au regard des grands personnages qui composent notre imaginaire commun du passé de notre pays. C’est un nœud problématique qu’il nous a semblé intéressant d’explorer en partant du principe que Jean-Candide, bien qu’il soit plein de bonne volonté, reste parfois aveugles à de nombreux points de vue. Des voix venues des profondeurs de l’histoire lui parlent, mais les entendra-t-il vraiment et changeront-elles non seulement son regard mais aussi sa manière d’agir ?
- Ce spectacle se veut mobile et diffusable. Nous souhaitions, pour cette première création du temps qui pique, partir sur un projet léger, que ce soit en termes de coût financier que de mobilité. Il nous a semblé important de pouvoir jouer ce spectacle dans tous types de lieux, que ce soit sur un plateau de théâtre que dans des lieux non-théâtraux (écoles ; résidences pour personnes âgés ; extérieur etc.).
A côté, des histoires plurielles sont apparues ces dernières décennies: histoires des mentalités, histoires culturelles, histoires populaires, histoire des femmes, des minorités etc. On cherche dans la profondeur du temps long plus que de l’événement les traces de destins collectifs jusque là restés bien souvent dans l’ombre. Une histoire complexe, affranchie des limites nationales. Mais comment les raconter sur une scène de théâtre… quand on est seul ?
Un combat se livre à l’heure actuelle entre ces deux visions de l’histoire et du monde. Histoires de France, le grand voyage interroge de manière ludique cette bataille d’idées grâce aux outils du théâtre, à travers la trajectoire d’un personnage qui n’est a priori dans aucun des deux camps. Ce novice en histoire qui voudrait rester en-dehors de ces querelles qui le dépassent va pourtant devoir se positionner. Un choix, pour lui, assurément cornélien.
Pourquoi un seul-en-scène?
- Ce spectacle est l’aboutissement d’une rencontre. C’est dans le prolongement des exposés universitaires théâtralisés, conçus et joués par les deux complices, que s’inscrit ce spectacle. Nous voulions, comme entrée en piste de la compagnie Le temps qui pique, préserver ce cadre de travail à deux qui nous est familier.
- Ce spectacle propose un point de vue. Le personnage principal, Jean-Candide, doit être une surface de projection possible pour les spectateurs. Il ne connaît pas spécialement tous les détails de l’histoire de la France, en a une vision héritée de l’école, parfois un peu naïve, mais a une capacité à voir, quand on lui présente les choses de manière accessible, ce qui pose problème. Son étrange prénom rappelle cet aspect. C’est donc du point de vue d’un personnage qui doit être l’allié du public que s’est construit ce spectacle.
Sources d'inspiration
Un ouvrage est à la base de l’écriture de ce spectacle : Le Mythe national de Suzanne Citron (2017), historienne et enseignante qui revient de manière critique sur le manuel phare de la IIIe République, le petit Lavisse, et ses épigones qu’on retrouve sur les pupitres des élèves jusque dans les années 1980, largement fondés sur une vision patriotique et sur l’idée d’une éducation morale par l’histoire. Notre imaginaire collectif est encore imprégné de ces manuels, avec les grands personnages, les grandes dates, les grandes victoires et progrès mais aussi les tragédies et les hontes, dont la France, qui devient elle-même un personnage en action (« La France veut... » « La France fait... » « La France devient... »), sort toujours non seulement indemne mais grandie. Ce roman national pose de nombreux problèmes, puisqu’il fonde une unicité de destins, balayant au passage les particularismes régionaux, et aujourd’hui les histoires complexes et multiples d’une population qui compte en son sein des millions d’individus issus d’origines très diverses.
Si l’on est semble-t-il revenu du fameux « Nos ancêtres les Gaulois... », comment raconter autrement ? Comment remettre sur le devant de la scène les angles morts du roman national ? C’est ce que proposent une myriade d’auteurs et d’autrices, tout autant historiens qu’essayistes ou même journalistes : Une histoire populaire de la France de Gérard Noiriel, centré sur le peuple longtemps resté invisible (2018), Michelle Perrot, dans son Histoire des Femmes en Occident co-dirigée avec Georges Duby, ou plus récemment Titou Lecoq avec Les Grandes Oubliées de l’Histoire (2021), ou encore l’ouvrage collectif Histoire mondiale de la France (2017), dirigé par Patrick Boucheron dans lequel plus d’une centaine d’auteurs et d’autrices interviennent pour montrer comment des histoires jusqu’ici parallèles et dépassant largement le cadre hexagonal s’entremêlent pour former une nouvelle histoire de France.
Théâtralement parlant, le sujet est également bien présent, de Roman(s) national du Birgit ensemble (2022) qui questionne l’emploi de l’histoire de France dans une campagne présidentielle à Histoire(s) de France d’Amine Adjina (2021) qui imagine une histoire de France jouée par des collégiens, au plus boulevardier La Folle Histoire de France (compagnie Terrence et Malik, joué depuis 2013). Toutes ces tentatives de raconter l’histoire de France autrement, de la rendre accessible en s’attachant à ne pas trahir les enjeux que ce récit contient nous ont grandement inspiré. De même, le théâtre didactique brechtien, redéployé par Adeline Rosenstein dans son Laboratoire Poison (autour de la colonisation, 2021), ou Et le coeur fume encore de Margaux Eskenazi sur la guerre d’Algérie (2022), nous donnent des outils pour voir ce qu’il est possible de faire quand il s’agit de théâtraliser l’histoire.
Nous avons donc baigné pendant plus de deux ans dans ces ouvrages, académiques ou non, dans la découverte de spectacles ou encore dans l’analyse d’émissions télévisuelles consacrées à l’histoire, pour créer ce spectacle original, HistoireS de France, le grand voyage, avec le défi supplémentaire et inédit du seul-en-scène.
Nous souhaitons remercier pour leur aide si généreuse :
Alice Quérel
Corentin Mallet
Oswald Harm